Volleyball Canada

Actualités

Profil d’entraîneur : Jimmy El-Turk

Les « Profils d'entraîneur » de Volleyball Canada sont fièrement présentés par par Mizuno, supporteur de nos équipes nationales et programmes d'entraîneurs.

Jimmy El-Turk a poussé son travail d’entraîneur une coche plus loin que celle d’une carrière – c’est devenu une obsession.

Après avoir conclu son parcours de joueur à l’Université de Windsor, il a commencé à travailler avec l’équipe, devenant éventuellement l’entraîneur adjoint à temps plein. Ce rôle a ouvert des portes à El-Turk, puisqu’il a ensuite dirigé des matchs aux Jeux du Canada et comme adjoint de l’équipe nationale féminine des moins de 18 ans de Volleyball Canada.

En 2015, El-Turk a été nommé entraîneur-chef du programme féminin du Collège St. Clair, menant l’équipe à une médaille de bronze de l’OCAA en 2018 – la première médaille du programme en 21 ans. En se concentrant à bâtir une culture à long terme et sur l’importance du recrutement, El-Turk a aidé à faire de ce programme un prétendant régulier au titre dans l’OCAA.

Volleyball Canada a récemment pu discuter avec El-Turk sur sa carrière d’entraîneur et a pu avoir quelques-unes de ses réflexions à propos du rôle d’entraîneur dans le monde du sport.

Volleyball Canada : Comment avez-vous fait la transition vers le rôle d’entraîneur? Est-ce que c’est quelque chose à quoi vous avez toujours pensé?

Jimmy El-Turk : Non, ce n’est pas quelque chose à quoi j’ai toujours pensé. Je ne savais vraiment pas ce que je voulais faire alors que j’étais étudiant. Je suis allé à l’Université de Windsor et j’ai obtenu mon diplôme en kinésiologie avec une spécialisation en gestion du sport. J’ai aussi fait une demande pour la maîtrise en gestion du sport. J’ai terminé ma carrière de joueur là et j’ai en quelque sorte fait la transition du côté des entraîneurs, mais pas vraiment. En fait, je passais du temps avec l’équipe, tentant d’aider alors que je complétais ma maîtrise. Plus la saison progressait, plus c’est devenu officiel alors que je commençais à avoir un peu plus un rôle d’entraîneur.

J’ai obtenu mon diplôme en 2013 et cet été-là, j’ai commencé à déposer ma candidature pour des boulots à travers le pays dans le domaine sportif. J’ai envoyé plus de 200 mises en candidature et je n’ai pas reçu un seul courriel ou appel en retour. C’était tout un défi et c’est très frustrant. Alors j’ai postulé pour un emploi de vendeur d’assurances ici à Windsor. Je l’ai obtenu, j’ai continué et j’ai signé mon contrat puis ils m’ont fait faire le tour des bureaux. Ils m’ont montré où j’allais travailler et c’était un cubicule sombre dans un sous-sol. À ce moment, j’ai réalisé que ce n’était pas ce que je voulais. Je suis retourné à la maison, j’habitais encore avec mes amis à ce moment, et je parlais à ma mère quand je lui ai juste dit que je ne pouvais pas faire ça. Alors je leur ai téléphoné et j’ai démissionné. J’avais signé mon contrat à peine une heure auparavant. Ma mère m’a demandé « qu’aimes-tu faire? » J’ai dit que j’aimais entraîner. Elle m’a demandé si je pouvais en faire une carrière et j’ai répondu que je ne savais pas, mais que j’aimerais m’en donner la chance.

J’ai téléphoné à James Gravelle, qui était l’entraîneur de l’équipe masculine à l’Université de Windsor. Il venait tout juste d’être embauché et allait vivre sa première saison. Je lui ai demandé s’il avait un petit budget pour un entraîneur adjoint. Il a dit qu’il avait 2000$ et j’ai répondu qu’il venait de se trouver un adjoint à temps plein. C’est tout ce que j’ai fait cette année-là, je n’ai occupé aucun autre emploi, alors j’ai été chanceux d’avoir des parents qui m’apportaient beaucoup de soutien. J’ai été capable de vivre ma première année avec Windsor en participant aux entraînements tôt le matin, en analysant des vidéos et en revenant pour des séances en après-midi. Je faisais aussi beaucoup de recrutement et c’est comme ça que je suis devenu obsédé et complètement accro. C’est comme ça que tout a commencé.

VC : Qui vous a soutenu au cours de cette expérience? Aviez-vous des mentors?

JET : Tout d’abord, rien de tout cela n’aurait été possible sans l’appui de mes parents et de mon frère. De pouvoir habiter avec mes parents sans payer de loyer pour pouvoir poursuivre mes rêves est un luxe que peu de gens ont. D’avoir mon frère qui m’a soutenu comme partenaire d’affaires pour avoir quelques revenus supplémentaires pendant la saison morte afin que je puisse aussi poursuivre mon rêve n’est pas non plus quelque chose que plusieurs personnes vivent, alors je dois tout à ma famille.

Pour ce qui est des gens qui m’ont appuyé, la liste est vraiment trop longue et je ne veux pas commencer à les nommer parce que je suis certain que j’en oublierais. Cependant une personne en particulier, Dale Melnick, a suffisamment cru en moi pour me donner une chance avec Équipe Canada. Dale est celle qui m’a permis d’avoir le privilège d’arborer la feuille d’érable sur mon survêtement, de représenter mon pays à l’international et sur quelques-unes des scènes les plus importantes dans le volleyball jeunesse, quelque chose que je n’aurais jamais cru possible et je lui serai éternellement reconnaissant d’avoir cru en moi.

Les deux mentors à qui je dois beaucoup de mon succès comme entraîneur, partenaire et père sont James Gravelle et Nathan Janzen. Ils m’ont tous les deux façonné de façon qui aille bien plus loin que les lignes de côté. James m’a offert la chance d’être derrière le banc d’une équipe U SPORTS comme entraîneur adjoint à l’Université de Windsor avec le programme masculin, ce qui nous a menés lui et moi à lancer SKY Volley, un club de volleyball pour jeunes garçons, ici à Windsor. Nathan est celui qui m’a fait intégrer le programme de volleyball intérieur d’Équipe Ontario et il est toujours une personne vers qui je me tourne régulièrement chaque fois que j’ai besoin de quelque chose, que ce soit en volleyball, dans la vie, la parentalité ou les jeux de prédiction de baseball.

 

VC : Quel a été le plus gros obstacle pour vous dans votre carrière d’entraîneur et comment l’avez-vous surmonté?

JET : Le plus grand obstacle pour moi a eu lieu en 2019 quand nous avons perdu en quarts de finale du Championnat de l’OCAA contre les Knights de Niagara, après avoir connu une saison de 15-3 cette année-là. Ç’a été un défi pour moi qui étais entraîneur depuis plusieurs mois, évaluant et réévaluant tout ce pour quoi j’ai commencé à faire ce travail. Je voulais me concentrer sur la victoire et j’étais si pris par le désir de gagner que j’ai perdu de vue le plus important : les gens.

J’ai réalisé que je ne menais pas l’équipe de la façon dont je voulais. Je ne prenais pas soin des athlètes de la façon dont je pensais le faire. Je ne priorisais pas la culture de construction dont je parlais. J’ai passé beaucoup de temps au cours de la saison morte à obséder sur le leadership et la culture, parlant à d’autres entraîneurs du fait que je pensais qu’ils faisaient un bon travail avec leur culture d’équipe et j’ai essentiellement appuyé sur le bouton de réinitialisation. Ça m’a pris quelques mois pour aimer le volleyball à nouveau, mais j’ai travaillé malgré ma peur personnelle ou celle de l’échec et de la déception, et je me suis motivé à remettre droit ce qui ne l’était pas. J’ai depuis travaillé avec assiduité pour prioriser la culture de l’équipe et les valeurs de base au lieu de notre fiche de victoires et de défaites sur le terrain.

 

VC : En lisant sur votre association avec les Saints du Collège St. Clair il y a six, on peut voir que vous parliez d’avoir une vision à long terme pour le programme, autour de la culture d’équipe. Comment avez-vous inculqué votre vision au programme?

JET : Ce que je voulais faire comme entraîneur de première année était de bâtir une culture autour de la ténacité, la résilience et la compétition. Notre personnel a priorisé le dur labeur dans le gymnase et sur le fait de bâtir une culture de volleyball autour de la défensive. Je voulais aussi être davantage un entraîneur de développement, particulièrement en sachant que le fait de recruter les meilleurs athlètes pour notre programme serait un défi dans les premières années et aussi qu’on aurait à développer les athlètes à l’intérieur de notre programme et localement à Windsor avant d’espérer ouvrir nos horizons vers un plus grand marché de recrutement en Ontario.

 

VC : Pensez-vous que vous avez eu du succès pour établir cette vision?

JET : Je crois que j’ai eu du succès en agrandissant notre profil de recruteur en Ontario, ce qui nous a certainement aidés afin d’obtenir du succès sur le terrain. En ce qui a trait à la culture, je pense que j’ai fait un 180 degrés par rapport à ce que je voulais et que les choses que j’estimais ne sont plus aussi haut sur la liste des priorités. Pour moi, le succès, c’est notre équipe qui gagne le titre de l’équipe académique de l’année à St. Clair à deux de mes quatre premières années, en faisant sentir le bienvenu chaque invité dans notre gym par tous les athlètes qui les accueille avec une poignée de main et une présentation personnelle afin qu’ils se sentent tous en sécurité chez nous. Ce sont les petites choses que j’utilise maintenant pour définir le succès, alors qu’auparavant, ce n’était qu’une question de victoires et de défaites.

 

VC : Vous avez mené l’équipe vers le bronze de l’OCAA, la première médaille du programme en 21 ans. Est-ce que cet accomplissement vous a aidé à valider votre travail effectué depuis le début?

JET : Ç’a certainement été un moment de validation pour mon personnel d’entraîneurs et moi. Je n’oublierai jamais ce match de la médaille de bronze, qui a été une démonstration incroyable de cran de notre équipe, qui perdait 0-2 et par une grosse marge en troisième et quatrième manches. J’ai quitté le gymnase ce jour-là en ne m’étant jamais senti aussi fier et je pense que ce moment a été important pour que je puisse ensuite devenir entraîneur avec l’Association de volleyball de l’Ontario et Équipe Canada.

 

VC : Vous avez eu d’intéressants recrutements, vous assurant l’engagement de joueurs qui n’avaient jamais entendu parler du Collège St. Clair et qui avaient d’autres universités qui tentaient aussi de les recruter. Qu’est-ce que votre programme a pour les attirer?

JET : Je pense sincèrement que c’est le côté chaleureux de notre école et de notre environnement de volleyball qui a fait que plusieurs des athlètes qui sont venus visiter notre établissement ont senti que ça leur convenait. Nous sommes une école de communauté, un petit, mais magnifique campus, et nous avons un groupe d’athlètes dans notre équipe qui prend de son temps pour que les espoirs et leurs familles se sentent les bienvenus, d’une façon inattendue. Je pense que notre succès sur le terrain nous a aidés à mieux vendre notre programme, et mon rôle avec Équipe Ontario au cours des dernières années m’a assurément permis de voir plus d’athlètes à l’œuvre, ce qui a donné lieu à plus de récents engagements de joueurs très en vue.

VC : Vous êtes aussi l’entraîneur-chef pour les filles d’Équipe Ontario en volleyball intérieur en vue des Jeux d’été du Canada et adjoint pour l’équipe junior des moins de 18 ans de Volleyball Canada. En travaillant constamment avec des joueurs de différents âges, différents genres et à différents niveaux, comment cela a-t-il amélioré vos aptitudes d’entraîneur?

JET : Selon moi, quand vous entraînez le même genre et le même groupe d’âge pendant longtemps, ça freine votre croissance comme entraîneur. D’avoir dirigé des camps de volleyball pour les athlètes de 12 et 13 ans est un processus très instructif parce que ça vous emmène dans des lieux où les trucs de base et la joie sont hyper présents et ça peut vous recentrer comme entraîneur. Quand je regarde jouer l’équipe masculine d’Équipe Canada dans la Ligue des Nations contre le Brésil ou la France, ce niveau de volleyball déclenche dans ma tête des réflexions sur le jeu que je n’aurais pas vu si je n’avais jamais entraîné mon équipe à St. Clair. D’avoir entraîné les hommes et les femmes de niveau postsecondaire, une équipe provinciale et un club m’a offert la perspective unique de mon rôle d’entraîneur que j’essaie d’exploiter le plus possible.

 

VC : Avez-vous un quelconque intérêt envers autre chose que le volleyball et le travail d’entraîneur et si oui, comment trouvez-vous l’équilibre entre cet intérêt et le volleyball?

JET : Stephanie (ma conjointe) et moi adorons être les parents de notre fils de six mois, Benjamin. J’étais emballé à l’idée de devenir papa et Ben a réussi à élever cet emballement à un autre niveau. Je suis aussi un très grand partisan de basketball. C’était mon premier amour dans l’enfance et j’ai joué davantage au basketball qu’au volleyball quand j’étais petit, alors j’aime le regarder, notamment la NBA. Je n’ai pas vraiment pu connaître un équilibre entre mon boulot d’entraîneur et ma vie de père parce que notre saison a été annulée, mais je peux déjà dire que la balance va pencher en faveur de mon rôle de père. J’aime le volleyball, ça m’a donné plus que je n’aurais jamais pu imaginer, mais il n’y a rien de plus important pour moi que la famille et trouver un équilibre sera certainement difficile, mais je crois que cela vient avec plus de points positifs que négatifs.

VC : Qu’est-ce qui vous rend le plus fier de votre carrière d’entraîneur?

JET : Je suis davantage fier d’avoir pu marcher dans les traces de James, Nathan et de Dale et de pouvoir donner au suivant avec les jeunes entraîneurs qui ont beaucoup à donner à ce sport. J’ai été assez chanceux pour être choisi comme entraîneur mentor dans le Programme féminin d’apprentissage (FACP) des entraîneurs de l’ACSC, ce qui a mené deux de mes anciennes athlètes du Collège St. Clair, Taylor Fitzgerald et Julie Ann Milling à ce programme d’apprentissage des entraîneurs et qui a fait en sorte que les deux font toujours partie du personnel de notre programme. Je pense que c’est très important d’ouvrir des portes pour l’un et l’autre et de travailler ensemble en tant que grande communauté de volleyball pour faire grandir le sport au Canada et enseigner aux jeunes des habiletés utiles dans la vie à travers ce merveilleux sport et je suis honoré d’avoir obtenu cette chance avec l’ACSC et très chanceux d’avoir Taylor et Julie Ann à mes côtés.

VC : Quel est votre ultime but en tant qu’entraîneur?

JET : Je pense qu’il y a deux volets. Le premier, c’est que j’aimerais gagner. J’aimerais remporter un championnat provincial avec le Collège St. Clair. L’année 1997 marque le dernier championnat provincial de volleyball féminin ici. Je pense que nos athlètes travaillent fort pour s’en approcher et je veux les aider à atteindre cet objectif. C’est le but qu’elles se fixent chaque année et je crois qu’il est important pour moi. Je pense que le fait de gagner est très important dans ma validation et que c’est certainement un grand objectif pour moi. Je mentirais si je ne disais pas que j’aimerais un jour être entraîneur-chef des jeunes ou du programme junior d’Équipe Canada. J’ai vraiment apprécié mon expérience avec Volleyball Canada et j’ai eu la chance de voyager dans des endroits extraordinaires et de rencontrer des gens incroyables. J’aimerais avoir la chance de poser ma candidature pour l’un des postes d’entraîneurs-chefs des équipes des moins de 16 ou de 18 ans, un jour.

 

À part de ça, je pense que mon boulot consiste à enseigner la vie à travers le volleyball. Je suis un enseignant et je ne me limite pas à une classe. Ma classe, c’est le terrain de volleyball. C’est la raison qui nous porte tous ensemble. Au bout du compte, j’entraîne des jeunes femmes et une partie de mon travail est de les aider à passer à travers le processus qui leur permet d’obtenir un diplôme avec plus de confiance, pour qu’elles soient prêtes à occuper des rôles de leader, à être des modèles et des pionnières pour la prochaine génération. Je sais que c’est difficile à quantifier, mais je pense que c’est ce qui me procure une raison d’être chaque jour.

 

VC : Avez-vous des conseils pour les nouveaux entraîneurs? Un conseil, un apprentissage, un appui ou autre que vous auriez aimé avoir à vos débuts?

JET : D’avoir confiance en vos aptitudes comme entraîneur, mais en même temps pas trop de confiance qui se mettrait en travers de votre croissance et de votre développement, d’être confiant en ce que vous faites, sans que ça empêche de viser l’amélioration, et de vous entourer de gens qui vont vous tirer vers le haut, des gens en qui vous aurez confiance lorsque vous en aurez vraiment besoin. Mon dernier conseil serait d’étudier exactement ce que les aptitudes d’écoute apportent et surtout de les mettre en œuvre, particulièrement lorsque vous êtes avec un plus grand groupe, avec d’autres entraîneurs. Vous ne savez jamais ce qui pourrait être l’élément déclencheur pour une autre carrière d’entraîneur, mais si vous n’êtes pas engagé à écouter ce que les autres ont à dire sans avoir le besoin de partager votre opinion, vous pourriez tout simplement rater une occasion de vous améliorer.

 

Block image placeholder

Jimmy El-Turk